Rompre avec le quotidien, en dormant ailleurs qu’à la maison. Quitter les murs de la classe, tout en partageant avec son enseignant et ses camarades des moments forts, et faire avec eux l’apprentissage de la vie collective. Apprendre, non plus dans les livres mais en allant à la rencontre du monde extérieur, à pied ou à vélo, au cœur d’une nature propice à l’éducation à l’environnement…
Ainsi peut-on résumer, au-delà de leur diversité, l’esprit des séjours et classes Usep. Des séjours que proposent de nombreux comités départementaux, la plupart du temps durant les deux derniers mois de l’année scolaire, plus favorables à ce genre de projet.
Apprentissage de la citoyenneté
Depuis trois ans, la Mayenne organise par exemple des classes sportives, principalement pour enfants de cycle 3 : deux à cinq jours dans un domaine situé en pleine forêt. « Les classes transplantées sont l’occasion d’apprendre à ″vivre ensemble″ et un moyen de développer chez le jeune l’esprit de solidarité » résume la plaquette de présentation. Avant d’insister sur la plus-value Usep, à savoir l’usage éducatif des activités sportives et le lien naturel entre « vie associative » et « apprentissage de la citoyenneté ».
Selon la durée du séjour et l’âge des élèves (1), l’enseignant construit le programme avec l’éducateur Usep, Fabien Huard. Le VTT, la course d’orientation, la randonnée (pédestre ou à vélo) permettent par exemple d’aborder les sciences, avec un travail sur l’environnement ouvrant sur la cartographie et la réalisation d’une maquette en volume. Quant au vélo, c’est un engin qui mérite d’être étudié sous un angle technique, en apprenant au passage à changer une roue ou monter sa selle...
Trois autres modules proposent de décliner chacun une approche de la citoyenneté : sécurité routière, santé, premiers secours. Enfin, l’apprentissage de la vie associative passe par l’organisation de jeux pour ses camarades et l’écriture d’articles, la prise de photos ou la réalisation de petits films. Jusqu’à déboucher parfois sur une réflexion plus théorique sur la notion d’association.
Un complément aux rencontres sportives Usep
« Ces séjours complètent l’offre Usep en temps et hors temps scolaire », explique Alexis Gille, délégué d’un comité qui, en cinq ans, est passé de 1400 à 5000 licenciés enfants. « Constatant la raréfaction des classes de découverte à la neige ou à la mer, en raison des budgets resserrés des communes, nous proposons aux classes de sortir de l’école, mais à quelques kilomètres seulement », précise Alexis Gille. Ceci dans le cadre de l’Usep et pour des séjours qui mettent à l’honneur les activités de pleine nature. « Lorsque c’est possible, nous proposons même un retour à vélo, parfois couplé à une participation au P’tit Tour ! »
Autre exemple : depuis 2013, le comité du Lot organise des « rencontres citoyennes » de deux ou trois jours sur la base de loisirs de Mézels, un centre de la Ligue de l’enseignement situé au bord de la Dordogne. Au menu, défis coopétitifs pour les enfants de cycle 3, et éducation à l’environnement, à partir de la vie d’une mare, pour leurs cadets de cycle 1 et 2. Un séjour « Petits têtards et petites grenouilles » qui fait directement écho à l’un des apprentissages du domaine 4 du socle commun : « découverte d’un écosystème naturel et du vivant »…
Quelques classes chaque année
« Au-delà de leur dimension sportive, ces séjours ouvrent sur d’autres domaines éducatifs », résume la déléguée Usep, Aurore Bonnet. Très prosaïquement, ils pourraient peut-être aussi compenser un peu le repli des rencontres Usep hors temps scolaire… « Dans un département rural comme le nôtre, les temps de trajet dissuadent les enseignants de prendre un car pour une demi-journée d’activité. Mais pour un séjour de deux ou trois jours, oui », observe Aurore Bonnet.
Cependant, le manque de disponibilité des délégués ou de leurs adjoints, très sollicités en mai-juin, permet rarement de proposer ces séjours à plus de quelques classes (2). Et il est difficile de convaincre les enseignants – « rendus fébriles par les mutations de juin », note Aurore Bonnet – de caler à la rentrée des séjours permettant pourtant de lancer une dynamique de classe... Le Calvados, pionnier avec ses « classes associatives » organisées depuis 2007, y a pourtant réussi un temps. Avant de revoir sa copie et de profiter des dernières belles journées d’automne pour accueillir l’an passé deux classes durant la deuxième semaine de novembre (3).
Les parcours itinérants font nombre
Les séjours itinérants, à pied ou à vélo, ne proposent pas forcément des contenus pédagogiques aussi élaborés, même si l’apprentissage de la sécurité routière est une condition indispensable à leur organisation, et la découverte du patrimoine local plus qu’un simple à-côté. En revanche, grâce aux parents accompagnateurs et à l’appui de divers partenaires, ils permettent à des centaines, voire des milliers d’enfants de vivre des moments inoubliables, sur les routes et les chemins.
En Loir-et-Cher, l’Étoile Cyclo a par exemple encore réuni ce printemps 700 enfants de CE2-CM1-CM2 sur plusieurs jours. Et les P’tites Randos, organisées en parallèle pour les enfants de grande section de maternelle, de cours préparatoire et de CM1, en ont mobilisé davantage encore ! (lire par ailleurs)
Depuis longtemps, la Seine-et-Marne ou la Drôme ont fait elles aussi de leurs randonnées cyclotouristes des étendards. Un peu à la manière du P’tit Tour, dans lequel certaines étapes s’insèrent parfois. Mais avec en prime le folklore des nuits en gîte ou sur les lits de camp des gymnases...
Demain, des milliers d’écoliers ?
Pour sa part, l’Usep de l’Ardèche ne s’est vraiment mise au vélo qu’en 2013. Mais elle ne manque pas d’ambition. Celle-ci a précisément pour nom « Voyage Itinérant à la Découverte de l’Ardèche » (Vida) et a vu pédaler fin mai 650 enfants et 150 adultes, pour des équipées de deux ou trois jours, sur un parcours de 60 km qui épouse la vallée de l’Eyrieux, au nord du département.
Fort du succès rencontré, le comité voit à présent plus loin. « Notre souhait, explique la déléguée, Marielle Rochette, est de créer un événement pérenne se déroulant sur l’ensemble de notre territoire et réunissant des milliers d’élèves des écoles primaires. »
Et si, demain, tous les écoliers faisaient l’école buissonnière avec l’Usep ?
Philippe Brenot
(1) « À l’image de nos rencontres, ces séjours n’étaient proposés qu’aux plus grands. Mais le récent accueil des élèves de toute une école, de la maternelle au cours moyen, va nous servir de base pour développer aussi une offre auprès des plus jeunes », précise Alexis Gille.
(2) En Mayenne, deux séjours mobilisant l’éducateur Usep et le délégué Ufolep (qui consacre une partie de son temps au sport scolaire) ont été organisés cette année. Du 9 au 12 mai, le premier a réuni les 76 enfants de l’école de Marcillé-la-Ville et, mi-juin, le second concernera des enfants de cycle 3. Dans le Lot, neuf classes s’étaient inscrites en 2014, contre deux seulement cette année.
(3) Deux classes de Magny-la-Campagne, accueillies sur le centre Ligue de Tourlaville (Manche).
